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Quel rapport peut-il y avoir entre des sprints et la progression en course ou même pour de longs parcours cyclosportifs ? Le simple fait de sprinter peut permettre non seulement de conclure victorieusement une épreuve, mais aussi et surtout, de progresser, si on se donne la peine de s’exercer régulièrement à l’entraînement.
Par Guillaume Judas – Photos : depositphotos.com, Grok
Sprinter est un terme commun à plusieurs actions sur un vélo. Mais ce terme général décrit en fait des processus physiologiques qui entraînent des effets différents sur l’organisme, ou qui sont dépendants de plusieurs types de carburants. Bref, on parle de sprint lorsqu’il s’agit de décrire des qualités de finisseurs, quand le but est de franchir la ligne d’arrivée le premier, ou encore lorsqu’il s’agit de piquer un sprint pour boucher un trou, ou attaquer dans le haut d’une bosse.
Même si l’on ne parle donc pas du même sprint, on se doute bien qu’aucune progression n’est possible dans ces phases critiques de la course ou d’une épreuve, sans un travail, voire un simple entretien des qualités nécessaires à l’entraînement.
Et pourtant. Combien voit-on encore de cyclistes ne jamais participer aux joutes des pancartes lors des sorties en groupe, ou même lever le cul de la selle pour se secouer et réveiller un peu toutes les fibres endormies ?
Même le cyclosportif pur et dur, adepte des longs parcours où l’endurance et la gestion de l’effort priment – deux notions a priori antinomiques avec l’idée même d’effort maximal sur une très courte distance – a tout à gagner à pratiquer ce genre d’exercice.

Minimum syndical
En plus des traditionnelles séances de train sur des parcours vallonnés, des quelques petites accélérations inopinées dans les bosses lors des sorties en groupe – ce qui contente encore les trois quarts des pratiquants au niveau de leur entraînement – le travail du sprint devrait être le minimum à s’imposer lorsqu’on souhaite progresser et atteindre les objectifs qu’on s’est fixés.
Pourquoi ? En tout premier lieu, dans le but de réveiller et d’entretenir les fibres musculaires dites rapides, et afin d’éviter le fameux effet diesel, lorsqu’on a l’impression de manquer de rythme malgré une très bonne condition physique. Ensuite, travailler le sprint, même pour un non-sprinter, cela permet d’améliorer sa propre vitesse maximale, ainsi que toute la coordination gestuelle et musculaire qui va avec.
Cette même vitesse maximale agit, par voie de conséquence, sur la vitesse de base du cycliste. En plus d’une amélioration de votre vitesse de base, travailler le sprint peut aussi présenter des aspects tactiques intéressants, qui aident notamment à progresser dans le sens du placement lors de n’importe quelle épreuve.
Enfin, le sprint, ou plutôt une succession de sprints permet de travailler à très haute intensité afin de faire progresser les capacités de surcompensation de l’organisme, tout en testant son aptitude à résister à l’acide lactique. C’est grâce à ce genre d’exercice que l’on prend conscience de la notion de réservoir énergétique, ainsi que de notre disposition à gérer plus ou moins tel ou tel type d’effort, selon la longueur du sprint et la manière dont on l’aborde.
Mise en place
Les sprints se travaillent principalement de deux façons.
La première consiste à jouer avec les camarades d’entraînement et sprinter aux pancartes symbolisant les panneaux d’entrée de villages ou d’agglomérations ; attention toutefois à la circulation ! Ce type de sprints, outre l’aspect ludique, développe le sens du placement et le côté tactique. En outre, c’est le meilleur moyen de tester sa distance de prédilection par rapport à la pancarte et l’effort à fournir. De se connaître, en quelque sorte.
La seconde, beaucoup moins amusante, consiste à enchaîner des séries de sprints, avec une récupération incomplète entre les efforts. Avec ce type d’exercice, on habitue l’organisme à encaisser l’accumulation d’acide lactique dans les muscles des jambes et des bras, et surtout à progresser dans le domaine.
Un bon moyen de donner un coup de fouet à la progression
Lors de certaines épreuves, cela permettra au cyclosportif de savoir gérer et de pouvoir récupérer plus vite des moments où il se met dans le rouge.
Pour le coureur, l’intérêt est plus qu’évident, quand on sait qu’une compétition ne se joue pas sur la distance, mais sur la succession d’accélérations et d’à-coups qui permettent d’accrocher le bon groupe ou de s’en détacher.
Lorsqu’on enchaîne les sprints de cette façon, il est inutile de préciser que le dernier de la série n’a plus grand-chose à voir avec un sprint en tant que tel, et que l’expression pédaler avec les oreilles prend à ce moment-là tout son sens.
Bien placée dans la semaine, une séance de ce type vide les réserves énergétiques en glycogène – le carburant du muscle à haut rendement – autant qu’une très longue sortie à allure très soutenue. Après une récupération et une alimentation appropriée, l’organisme se renforce et est prêt, le jour de l’épreuve, à subir une agression plus importante. C’est le principe désormais bien connu de la surcompensation.

Exemples d’exercices
Bien sûr, nous sommes tous limités dans le domaine du sprint, ne serait-ce que par le facteur génétique. Puissance musculaire, explosivité, détente et vélocité ne peuvent se développer à l’envi. Pourtant, de nombreux pratiquants utilisent ce prétexte pour ne jamais travailler cette phase critique.
Les variétés d’exercices sont pourtant nombreuses. Outre les sprints aux pancartes lors des sorties en groupe, il est toujours possible de s’exercer plus régulièrement en entrecoupant les sorties traditionnelles (même en solo) par des sprints espacés, par exemple toutes les 30 ou 40 minutes.
Plusieurs options s’offrent à vous au moment de lancer un sprint, même seul. Viser un panneau au loin comme ligne d’arrivée fictive, se référer au chrono et viser un sprint de 10, 15, 20, voire 30 secondes, démarrer le sprint avec tout à droite, ou au contraire descendre les dents une à une, se forcer à tout faire en hyper-vélocité, etc.
Bref, les variantes d’exercices sont multiples, avec toujours le même but : progresser dans la vitesse de réaction, le punch et/ou la pointe de vitesse maximale. Avec le temps, vous apprenez aussi à gérer le sprint, en fonction de la distance qui vous sépare de son terme. Un démarrage plus ou moins sec laisse moins de carburant en fin de sprint, surtout si celui-ci est assez long.
Aspect tactique
La longueur arrachée à l’adversaire dans les trois premières secondes du sprint sera-t-elle suffisante au bout de 300 m, surtout si celui-ci sprinte au contraire tout en accélération ? Bref, vous pouvez vite prendre goût à l’exercice spécifique du sprint, à condition d’en retirer quelque chose à chaque fois, sur le plan tactique et en termes de connaissance de soi et de vos propres capacités.
Vous pouvez vite prendre goût à l’exercice spécifique du sprint, à condition d’en retirer quelque chose à chaque fois, sur le plan tactique et en termes de connaissance de soi et de vos propres capacités.
Pour les séries de sprints, la gestion de l’effort est un peu différente, puisque le but est de toute façon de finir exsangue et de vider les réserves énergétiques. L’intérêt est donc de tout donner sur le nombre de sprints ou de séries que vous avez déterminés. En fonction du niveau de départ et/ou de l’état de progression, vous pouvez envisager des sprints de 15 secondes, entrecoupés de 30 secondes de récupération, ou d’une récupération plus courte (égale au temps de travail). Une bonne série de cinq à huit fois 15’’/15’’, ça calme déjà comme il faut.
Ensuite, selon les points faibles à améliorer ou les points forts à préserver, vous pouvez varier la longueur de chaque sprint. Plutôt du 10’’/10’’ si vous souhaitez progresser sur le démarrage en lui-même, ou alors du 30’’/30’’ à très haut niveau, quand vous souhaitez travailler votre capacité à résister à l’acide lactique.
Ne croyez pas cependant que plus les exercices sont courts, plus ils sont faciles, car en fait, le temps de récupération, s’il est égal au temps de travail, est aussi une composante à prendre en compte. En fonction de la progression, il est possible de fractionner les exercices en deux, trois ou quatre séries de plusieurs répétitions.
En bosse ou sur le plat, vous pouvez varier les plaisirs. Il est même possible d’insister sur un braquet spécifique sur ces mêmes séries, selon que vous recherchiez le punch et la tonicité, ou la force brute.
La bonne programmation
Quand programmer des entraînements avec des sprints ? Pour les sprints isolés ou aux pancartes, il n’y a pas de règle. C’est possible toute l’année, en fonction de l’envie et du caractère ludique de la sortie. Pour les séries de sprints spécifiques, comme énoncé plus haut, il faut se montrer beaucoup plus prudent…
D’une part, car il faut tenir compte de l’exigence de ce type d’exercice sur le plan physique. Il ne faut pas risquer un déséquilibre entre les sorties à dominante aérobie, les compétitions, et le travail lactique qui ne doit venir que chapeauter le tout. Il est donc conseillé de ne faire ce type d’exercices qu’à l’approche des objectifs.
Et, d’autre part, il faut penser à la difficulté mentale que représente cette mise volontaire en état de choc, lors de séances où vous vous retrouvez souvent seul face à vous-même.
Finalement, comme tout élément qui concourt à la progression, sprinter est toujours une question de mesure, de patience et de gestion.
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