Partager la publication "Repousser ses limites en vélo : la méthode du Sherpa"
Les interminables séances sur home-trainer, ou les sorties longues en vélo ou en course à pied sont un défi aussi physique que mental. Bien souvent, ce n’est même pas l’intensité qui nous freine, mais… la durée. L’ennui, la lassitude ou le découragement s’invitent en route et grignotent notre motivation. Comment alors apprivoiser l’effort prolongé sans le subir ? En s’inspirant des Sherpas, ces guides himalayens qui accompagnent les alpinistes sur les plus hauts sommets du monde, nous pouvons transformer nos longues sorties en une aventure maîtrisée, où l’ennui disparaît et où chaque kilomètre devient une victoire.
Par Jeff Tatard – Photos : depositphotos.com / DR
1. Voir grand, mais avancer petit
Un Sherpa ne dit jamais à un alpiniste fatigué : « Il reste 2000 mètres ». Il préfère fixer des étapes intermédiaires : « Atteignons ce rocher, et on verra ensuite. » C’est exactement cette approche qui nous permet de repousser nos limites sans être submergés par l’ampleur du défi.
En pratique :
• Découpez votre sortie en segments de 10 à 20 km ou en tranches de 30 minutes.
• Fixez-vous des objectifs intermédiaires concrets : « Jusqu’à ce village », « jusqu’à cette montée », « jusqu’à la prochaine pause ravito ».
• Associez chaque portion à une intention : cadence, respiration, fluidité du pédalage.
Ainsi, vous avancez sans penser à la totalité du parcours, mais en enchaînant de petites réussites qui maintiennent votre motivation intacte.
2. Entrer dans l’état de Flow
L’alpiniste qui regarde constamment le sommet se décourage. En revanche, celui qui est absorbé par chaque pas, chaque prise, entre dans un état où l’effort devient presque naturel. C’est le Flow, cet état de concentration totale décrit par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi.
En vélo, le coach Jose Lopez, qu’on a interrogé pour rédiger cet article nous dit qu’on y accède en trouvant un équilibre parfait entre effort et plaisir. Pour cela :
• Ajustez votre intensité pour qu’elle soit stimulante mais soutenable.
• Focalisez-vous sur le mouvement, sur la sensation de glisse des roues, sur votre respiration.
• Intégrez des distractions positives : un podcast, une playlist motivante, un jeu mental (« Combien de virages avant le sommet ? »).
L’objectif est de vous immerger totalement dans votre sortie, au point d’oublier le temps qui passe.
3. Tromper l’ennui avec des stratégies mentales
Le coach Lopez nous explique que les cyclistes d’ultra-endurance utilisent des techniques pour détourner leur esprit de la fatigue et de la monotonie. Voici selon lui les trois approches les plus efficaces :
• La dissociation cognitive : détournez votre attention en racontant mentalement votre sortie comme si vous faisiez un reportage. Imaginez que vous êtes dans une grande course et commentez votre progression.
• L’association positive : transformez chaque élément du paysage en repère mental. Une montée difficile ? Imaginez qu’elle recharge votre énergie. Un vent de face ? Prenez-le comme un allié pour travailler votre puissance.
• La méditation active : concentrez-vous uniquement sur votre respiration, sur le bruit des pneus, sur la sensation des muscles en mouvement. Cette approche élimine l’anxiété et favorise l’endurance mentale.
4. Devenir son propre Sherpa
Selon 3bikes un bon guide anticipe les difficultés et ajuste constamment son approche. Faites de même avec vous-même :
• Checkpoints réguliers : évaluez votre état toutes les 30 minutes. Avez-vous faim ? Froid ? Faut-il ajuster votre position ?
• Mantra personnel : trouvez une phrase motivante à vous répéter en cas de baisse d’énergie (« Chaque coup de pédale me rapproche du sommet »).
• Mini-récompenses : autorisez-vous une gorgée de boisson sucrée, une barre énergétique ou un changement de rythme après un effort soutenu.
En adoptant cette posture, vous prenez le contrôle de votre sortie au lieu de la subir.
5. L’entraînement mental, clé de la progression
Un Sherpa ne devient pas un expert en un jour. Il s’aguerrit avec le temps, apprenant à gérer l’altitude, la fatigue et l’imprévu. Pour vous, il en va de même : l’endurance mentale se construit progressivement.
• Augmentez vos sorties de 10-15% chaque semaine pour habituer votre cerveau à l’effort prolongé.
• Revisitez vos précédentes victoires : « J’ai déjà tenu 4 heures, aujourd’hui 4h30, c’est possible ».
• Dédramatisez la fatigue : elle est normale, mais elle ne définit pas votre sortie. Voyez-la comme un signal à écouter, pas comme un obstacle insurmontable.
6. Soigner la formulation de ses pensées
C’est un détail qui semble anodin, mais qui fait une énorme différence sur le mental. Le cerveau ne traite pas les formulations négatives de la même manière qu’un ordre affirmatif. Dire « Je ne veux pas abandonner » revient à envoyer inconsciemment le message « abandonner ».
Notre ami Baptiste Chassagne, deuxième de l’UTMB en 2024 et qui aime aussi beaucoup le vélo nous l’explique bien : il entraîne ce mécanisme hors compétition pour qu’il devienne naturel en course. À chaque instant, il reformule positivement ses pensées.
Exemples concrets en vélo :
« Je ne veux pas ralentir » → « Je garde une bonne cadence »
« Je ne dois pas me crisper » → « Je relâche les épaules »
« Je ne veux pas craquer » → « Je tiens mon rythme »
Ce travail quotidien sur le langage intérieur évite d’auto-saboter son mental en pleine sortie. L’effort devient une progression maîtrisée plutôt qu’une lutte contre soi-même.
Conclusion : la sortie longue, un voyage intérieur
En appliquant ces stratégies, on vous fait une promesse sur 3bikes, celle qu’une sortie longue ne deviendra plus jamais une contrainte mais un voyage, un défi maîtrisé où l’ennui disparaît au profit de la progression et de la découverte.
Que ce soit sur un col mythique ou une plaine infinie, adoptez la posture du Sherpa : avancez pas à pas, restez dans l’instant, adaptez-vous au terrain et transformez chaque coup de pédale en une nouvelle étape vers votre sommet personnel.
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