Partager la publication "Écho de gloire et de rédemption, le voyage de Jérôme Chiotti"
Dans les méandres sinueux de l’Aveyron, entre les horizons infinis et les vallées enchanteresses, se dessine le portrait d’un homme au destin hors du commun. Son nom résonne comme une légende, portant en lui le poids des victoires et le fardeau des épreuves. Voici l’histoire fascinante de Jérôme Chiotti, un récit qui traverse les époques et les épreuves, éclairant le chemin de ceux qui osent rêver.
Par Jean-François Tatard – Photos : DR
« Je m’appelle Jérôme Chiotti », commence-t-il sobrement en guise de prologue ou d’introduction, comme une invitation à plonger dans les méandres de sa vie. Né à Millau le 18 janvier 1972, il est le père aimant de deux filles, Lou et Mayane, et le compagnon dévoué de Marielle. Mais derrière ce visage ordinaire se cache une trajectoire extraordinaire, marquée par les sommets vertigineux du cyclisme professionnel.
Sa passion pour le vélo prend racine sur les bosses et dans les sauts sur les pistes de BMX. Jeune prodige, il gravit les échelons avec une détermination sans faille, attirant l’attention des plus grands. BMX, cyclo-cross, route, VTT, il touche à tout avec succès, accumulant les titres régionaux, nationaux et mondiaux. « Le vélo est devenu ma vie, mon souffle, mon horizon », confie-t-il avec émotion, évoquant les premiers pas d’une destinée hors du commun.
Son arrivée chez les professionnels marque le début d’une épopée sans précédent. Au sein de l’équipe Catavana-Corbeil Essonnes en 1994, il fait ses premiers pas avec une aisance déconcertante. « Mes débuts chez les pros ont été un rêve », se remémore-t-il avec nostalgie, évoquant les courses épiques et les rencontres marquantes qui jalonnent son parcours. L’année suivante, il est champion de France de cyclo-cross, au sein de l’éphémère équipe du Groupement. Mais c’est en intégrant la légendaire équipe Festina que Jérôme touche les étoiles. En 1996, il décroche le titre suprême de champion du monde de VTT, gravant son nom dans l’histoire du sport.
Pourtant, derrière les feux de la rampe, se profile l’ombre d’un passé trouble. Confronté à ses propres démons, Jérôme fait preuve d’un courage admirable en affrontant la vérité avec une sincérité désarmante. Au printemps 2000, il avoue tout publiquement. Ses dérives, ses liens avec le dopage. Il rend son maillot arc-en-ciel. Sa chute du firmament du succès le plonge dans les abîmes de la désillusion. « Quitter le monde professionnel a été un soulagement », avoue-t-il, évoquant les années sombres où il lutte pour se reconstruire.
Mais c’est dans l’adversité qu’il puise sa force, cherchant refuge dans la course à pied pour retrouver le chemin de la lumière. Plusieurs années après sa retraite sportive officielle et avec 15 kg de trop, il chausse les chaussures de running et retrouve des objectifs personnels. À travers chaque foulée, chaque kilomètre parcouru, Jérôme renoue avec l’essence même de son être. « La course à pied m’a sauvé la vie », confie-t-il avec émotion, évoquant les moments de doute et de renaissance qui ont jalonné son chemin.
Vainqueur du marathon des 100 km de Millau en 2013, vainqueur des 100 km du Périgord Noir en 2014, 2h28′ au marathon de Paris en 2015 (25e au scratch) et 3e des 100 km de Millau en 2018 : il démontre qu’à plus de 40 ans il n’a strictement rien perdu de son talent. Bientôt, le triathlon devient son nouveau terrain de jeu, un défi ultime où il repousse les limites de l’endurance et de la résilience. À tout juste 50 ans, il termine 17e au scratch de l’Embrunman, une performance XXL.
Lorsque la question se pose sur les enseignements tirés de son parcours tumultueux, Jérôme Chiotti se plonge dans une introspection profonde. « Difficile de répondre à ça… », commence-t-il, comme hésitant à dévoiler les méandres de son âme. Mais bientôt, les mots coulent comme un torrent impétueux, emportant avec eux les vérités les plus intimes. « Je suis juste fier d’avoir été l’un des très rares à me sortir seul de toute cette hypocrisie », confie-t-il avec une sincérité poignante, évoquant le combat solitaire qu’il a mené pour briser les chaînes de l’omerta qui règne sur le monde du vélo, et plus largement sur tous les sports. « Fier aussi si j’ai pu ouvrir les yeux à quelques jeunes, quelques parents aussi », ajoute-t-il avec humilité, conscient du rôle qu’il a joué dans la prise de conscience collective.
Pourtant, derrière cette fierté, se cachent les cicatrices invisibles d’une bataille acharnée. « J’ai beaucoup perdu financièrement et durant ma reconversion », avoue-t-il avec amertume, évoquant les obstacles et les préjugés qui ont jalonné son chemin vers la rédemption. Mais malgré les épreuves, son regard reste tourné vers l’avenir, empreint d’une sagesse acquise au prix de sacrifices inestimables.
« Ma vision du vélo ? Je vais te décevoir. Elle n’a pas changé », affirme-t-il avec une conviction inébranlable, dénonçant l’omerta qui continue de gangrener le monde du cyclisme, comme un poison insidieux. « L’actualité du cyclisme ? Je suis de loin, de plus en plus loin », dit-il avec une pointe de mélancolie, regrettant le fossé qui s’est creusé entre lui et les nouveaux visages qui peuplent les pelotons d’aujourd’hui.
Pourtant, au milieu de cette désillusion, subsiste une lueur d’espoir. « Je m’émerveille des courses trépidantes que nous offrent Van Aert et Van der Poel sur les classiques et Pogacar et Vingegaard sur le Tour », avoue-t-il avec une sincérité désarmante, reconnaissant la beauté du spectacle malgré les ombres qui le ternissent. Et parmi tous ces champions, un nom résonne avec une intensité particulière : « Julian, le dernier à m’avoir émerveillé », confie-t-il avec émotion, évoquant la force et la résilience d’un homme confronté à l’adversité.
Ainsi, au fil de ses mots, se dessine le portrait d’un homme dont le regard sur le monde cycliste transcende les frontières du sport. Car au-delà des victoires et des défaites, c’est la quête éternelle de vérité et d’intégrité qui guide son chemin, illuminant l’obscurité de l’omerta de sa lumière éclatante. Et peut-être, à travers son témoignage, chacun de nous trouvera la force de défier les conventions et d’embrasser sa propre vérité, aussi douloureuse soit-elle.
Aujourd’hui, Jérôme contemple le chemin parcouru avec humilité et gratitude. « Les années passent, la forme décline, mais l’esprit demeure », affirme-t-il avec sérénité, évoquant ses projets futurs avec une lueur d’espoir dans le regard. Car au-delà des victoires et des défaites, c’est le voyage lui-même qui façonne l’homme, lui donnant la force d’affronter les tempêtes et de savourer les instants de grâce.
Ainsi se clôt le chapitre de Jérôme Chiotti, un homme dont le courage et la détermination ont marqué l’histoire du sport. Dans les montagnes de l’Aveyron, son nom résonnera à jamais comme celui d’un héros, dont la quête de vérité et de rédemption inspire chacun à embrasser sa propre destinée. Et peut-être, à travers son histoire, chacun de nous trouvera la force de gravir nos propres sommets, portés par la lumière de l’espoir et de la résilience.
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