Partager la publication "Test du Lapierre Aircode DRS 6.0"
Né pour bonne partie de la volonté des sprinteurs de l’équipe Groupama – FDJ d’avoir le vélo le plus rapide possible, le Lapierre Aircode DRS est un vélo orienté vers la vitesse et prévu pour gagner des courses. Mais qu’en est-il pour l’utilisateur qui recherche un minimum de polyvalence sur tous les terrains et qui n’a pas forcément prévu d’épingler un dossard sur une course ? Corollaire de cette question, comment peut se comporter ce vélo en montagne quand il faut rouler avec de faibles puissances sur de petits braquets et donc solliciter le cadre de façon moins tranchante ? Réponse avec la version 6.0 de cette famille de cadres, un modèle qui limite son prix à 5299 €.
Texte : Olivier Dulaurent – Photos : ©Lapierre, ©3bikes.fr
Dans les gammes de nombreuses marques du marché et concernant les vélos les plus performants, deux philosophies s’affrontent : tout d’abord les marques qui schématiquement ont un vélo pour la montagne et un autre vélo pour la vitesse sur le plat. Et les autres qui tentent d’avoir un vélo polyvalent, apte à performer sur tous les terrains. Lapierre se situe dans la première catégorie et il existe donc une vraie distinction entre le Xelius pour les grimpeurs et le Aircode qui nous intéresse ici, plutôt pensé pour les sprinteurs. À ce sujet, et suite à une longue collaboration avec les professionnels de Groupama – FDJ qui s’est terminée fin 2023, c’est à la demande des coureurs orientés vers les Classiques et les sprints avec en tête Arnaud Démare que ce vélo a été développé. Dès lors, il est facile d’imaginer que les recherches ont tourné autour d’un vélo aéro et rigide, deux caractéristiques qui vont a priori à l’encontre de la polyvalence et de la capacité à grimper.
Le Aircode DRS est sorti en 2021 et Lapierre proposait ainsi une troisième itération de son modèle orienté vers l’aéro, déjà validé par Arnaud Démare l’année précédente sur quelques courses notables.
Les formes des tubes dérivent des profils NACA (National Advisory Committee for Aeronautics) et pour suivre une tendance générale, le dégagement au niveau des pneus permet l’utilisation de sections de 28 mm même si dans le cadre de l’essai, ce sont des 25 mm en Tubeless qui ont été testés.
Le DRS prévoit également de répondre à deux problèmes couramment associés aux vélos de route aérodynamiques : le poids et le confort. En termes de poids – même en tenant compte de la forme accrue des tubes aérodynamiques – Lapierre a réussi à réduire de plus de 80 g le poids du cadre, le ramenant autour de 900 g.
En ce qui concerne le confort, une configuration de la fibre de carbone et la sélection des matériaux ont amélioré la souplesse à l’arrière de 12 %.
Sur le plan de la géométrie, le côté maniable et nerveux est plutôt mis en avant avec un empattement relativement court et des bases mesurant seulement 405 mm, une mesure rare avec les transmissions et les freins à disque modernes.
Côté aérodynamique, le cintre d’origine est prévu pour pouvoir y fixer des extensions aérodynamiques (incluses avec le vélo), qui transforment potentiellement le vélo en machine de Contre-La-Montre (avec les réserves liées à la géométrie du cadre) ou encore dans l’idée de disputer un duathlon ou un triathlon.
Le tube de selle est « isolé » du reste du cadre et ceci lui permet théoriquement une certaine flexion puisqu’il n’est pas joint aux haubans. Ceux-ci se raccordent ici dans le tube supérieur plutôt que de se connecter au tube de selle. Ceci est une alternative originale parmi la production moderne en face des devenus classiques haubans abaissés.
Sur la route
Le vélo testé est un cadre en taille XL, la plus haute disponible. À noter qu’avec la selle sortie au maximum (limite visible sur la tige de selle), la hauteur de selle est voisine de 84,5 cm. Si cela va évidemment suffire pour la grande majorité des cyclistes, cela peut être un frein pour les plus grands gabarits. D’ailleurs, la taille XXL n’est aujourd’hui plus disponible. Sur le plan de la géométrie, par rapport aux standards pour cette taille le vélo est dans la norme question longueur (on préfère aujourd’hui utiliser la mesure Reach plutôt que la longueur du tube supérieur) mais plutôt bas (mesure déterminée à présent avec le Stack plutôt que la longueur de la douille de direction). Par ailleurs, avec 73,5° en taille XL, l’angle de selle est relativement droit pour cette taille, tandis qu’elle est dans les normes pour les tailles intermédiaires et inférieures (73,5° et 74° respectivement).
Dès les premiers coups de pédale, la rigidité est présente mais pas excessive. Le vélo dans son ensemble ne fléchit pas mais il ne semble pas inerte pour autant et il s’agit là d’une vraie bonne surprise dans la mesure où son orientation vers la vitesse et sa capacité à satisfaire un coureur comme Arnaud Démare faisait craindre le « pire » quant au côté accessible du comportement. Sa rigidité semble également très homogène et parfaitement répartie entre la partie avant (douille) et la partie milieu/arrière (boitier surtout et bases). Cette homogénéité le rend très agréable et finalement plutôt facile à emmener même en roulant en allure endurance. Cet aspect se confronte à d’autres vélo comme le Cervélo R5 testé testé l’année dernière dont la douille très rigide dénotait presque face à la rigidité au niveau du boitier et réclamait même une gestuelle adaptée au moment de se lever de la selle. Ici à l’inverse, il n’est pas nécessaire de modifier son geste en se mettant en danseuse.
Les roues « maison » en 42 mm de hauteur sont le prolongement de ce comportement en se montrant polyvalentes et suffisamment flexibles sous la contrainte. Pour un usage plus orienté vers la performance pure et notamment les courses, une paire de roues encore plus rigide et haute serait un très bon complément.
Sa rigidité semble également très homogène et parfaitement répartie entre la partie avant (douille) et la partie milieu/arrière (boitier surtout et bases).
Un aspect peut perturber lors des premières sorties, voire au-delà selon ses préférences : le choix des braquets. Le vélo d’essai est ainsi monté avec une combinaison de plateaux 48/35 et une cassette 10/36. Si la fourchette de développements est idéale pour la haute montagne, sur des reliefs moins escarpés les ruptures de cadence au passage d’un pignon à l’autre sont parfois perturbants lorsque l’on s’approche de ses propres limites physiques. Il faut alors choisir entre un braquet « trop petit » et un autre « trop gros ».
Le confort est bien présent, malgré la présence de pneus en 25 mm de section « seulement » pour les standards d’aujourd’hui. Cependant la largeur des jantes les ferait presque passer pour du 28 mm. Leur grip s’est également montré impérial, que ce soit sur le sec comme sur le mouillé. À noter deux crevaisons (une pour chaque roue) lors de la toute dernière sortie pour ce test. Seule la première a pu être colmatée par le liquide préventif contenu à l’intérieur du pneu. Pour la deuxième, le trou était trop important pour être rebouché mais la proximité avec la maison (1 km) et le reste de pression a permis de rentrer sans soucis.
En descente, le Lapierre Aircode bénéficie d’un bon compromis entre stabilité et maniabilité, bien aidé par des roues précises et peu sensible au vent latéral probablement grâce à la largeur des jantes tout comme à leur profil bien choisi justement entre aéro/rigidité et sensibilité au vent latéral/maniabilité. Le vélo se place parfaitement dans les virages serrés et flirter avec les 80 km/h ne pose pas de soucis non plus.
Quand la pente se fait négative, il n’y a guère que le freinage issu du groupe Sram Rival qui ne répond pas aux attentes : avec une course au niveau du levier de frein plutôt spongieuse dont une partie de cette course est « morte », les petits ralentissements tout comme les forts freinages se montrent difficiles à doser. L’utilisateur sait que ça peut freiner faiblement ou fortement mais il a du mal à prévoir les deux actions. Pour une pression constante sur le levier, le ralentissement n’est lui-même pas constant. Autre exemple, dans un peloton où de faibles corrections sont parfois suffisantes mais nécessaires, la longue course du levier rend le procédé un peu perturbant. Et quand il est demandé au vélo de freiner le plus fort possible sur une courte distance, typiquement avant un virage en épingle la sensation spongieuse ne permet pas de reproduire systématiquement les meilleurs décélérations possibles. Pour le reste, et bien qu’il ne soit hiérarchiquement que le troisième groupe du fabricant américain, le Sram Rival n’apporte que des satisfactions avec des changements de vitesses rapides et précis, que ce soit pour les pignons ou les plateaux.
En fin de compte, les excellentes prestations du Lapierre Aircode DRS 6.0 (polyvalence, vitesse, confort) sont à mettre en face de son prix public fixé à 5299 €. Si cela reste toujours d’une somme importante, le cadre utilisé ici est le même que celui qu’utilisaient encore les coureurs de Groupama – FDJ en 2023 et toujours utilisé par les filles de l’équipe FDJ – Suez pour l’année en cours. Et même si le groupe Sram Rival n’est pas parmi les plus prestigieux du marché, il permet de maintenir le prix du vélo au tiers de la plupart des vélos évoluant en World Tour. Le comportement global du vélo a constitué une bonne surprise par rapport à ses caractéristiques supposées. En effet, étant donné le positionnement du vélo, il était possible de s’attendre à une machine de compétition pure, inflexible sous la contrainte. Or, le Lapierre Aircode DRS s’accommode aussi parfaitement des sorties effectuées à rythme peu soutenu ou encore avec des ascensions où les petits braquets sont de rigueur. En bref, une polyvalence réussie.
Le Lapierre Aircode DRS 6.0 en bref… Les + : rigidité bien dosée, polyvalence, rapport stabilité/maniabilité, confort suffisant, roues agréables à emmener, changements de vitesse rapides et précis, prix contenu Cadre : Aircode DRS disc thru Axle UD Superlight Carbon – Fourche : Aerostorm DRS Disc thru axle UD Superlight carbon – Cintre : Lapierre Aero UD carbon, largeur : 400 mm (XS,S), 420 mm (M,L,XL), Drop : 130 mm, Reach : 80 mm – Potence : Lapierre, -5,7°, Ø: 31,8 mm, L: 90 mm (XS,S), 100 mm (M), 110 mm (L), 120 mm (XL) – Roues completes : Lapierre Road Disc Carbon 700x21c, 42 mm hauteur, XDR driver, Tubeless Ready – Pneus : Schwalbe ONE Performance TLE 25-622 – Selle : Prologo Dimension STN rails – Tige de selle : Lapierre Aero Carbon, déport 0 mm – Freins : Sram Rival hydrauliques 160/140 mm – Dér. Avant : Sram Rival AXS 12 v – Dér. Arrière : Sram Rival AXS 12 v – Leviers : Sram Rival AXS 12 v – Cassette : Sram Rival 10-36 – Chaîne : Sram Rival AXS 12 v – Pédalier : Sram Rival AXS 12 v 48-33 170 mm (XS/S) / 172,5 mm (M/L) / 175mm (XL) – Nombre de tailles : 5 – Prix : 5299 € Contact : Lapierre |
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