Partager la publication "Attention à l’effet peloton…"
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Lors des confinements et des périodes de déconfinement, il est demandé aux cyclistes de rouler seul. Malheureusement, nous sommes très peu nombreux à savoir le faire. Pour la majorité des cyclos, c’est en peloton ou rien du tout…
Par Bruno Cavelier / Cyclosport magazine n°143 – Photos : pxhere.com / pixnio.com / pixabay.com / DR
Alors que le coureur à pied, bien qu’appréciant les grand-messes comme le marathon de Paris ou autre course de masse, préfère généralement partir s’entraîner seul probablement par souci de liberté – à la rencontre de la nature et de lui-même – pour le cycliste, c’est exactement l’inverse. Nous l’avons encore constaté le dernier dimanche de novembre, le jour où la barrière du kilomètre et de l’heure d’activité, est passée à 20 km pour une durée de 3 heures. Le dernier décret autorisait : « Déplacements, sans changement du lieu de résidence, dans la limite de trois heures quotidiennes et dans un rayon maximal de vingt kilomètres autour du domicile, liés aux activités de plein air suivantes : a) Activité physique ou loisirs individuels, à l’exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d’autres personnes ; b) Promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile… »
Pourtant, en ce jour sacré de libération, nous avons vu fleurir des points de rendez-vous sur les réseaux sociaux et rencontré sur la route des pelotons – certes réduits – mais malgré tout des cyclistes roulant en groupe ; sans parler de ceux qui ont préféré prolonger l’usage de leur VTT pour se rassembler en forêt afin d’éviter d’éventuels contrôles…
À l’abri !
L’effet peloton – c’est bien connu – c’est le phénomène d’abri. Comme le répète le Druide – Cyrile Guimard, la référence en termes d’entraînement cycliste – « le vélo, c’est de la voile ». Contrairement au coureur à pied dont la vitesse ne permet pas de profiter pleinement du sillage de celui qui le précède, un cycliste en queue de groupe, peut réaliser environ 30 % d’économie d’énergie par rapport à ceux qui ouvrent la route. Est-ce vraiment pour cette raison qu’au moins 80 % des cyclistes ne conçoivent pas leur pratique à titre individuel ?
La coursette…
Quelque chose nous dit que non. Il suffit d’observer le regard fier et légèrement détaché de celui qui est arrivé le premier en haut d’une bosse où le groupe à fini par se disloquer sous les coups de boutoir des plus costauds. Puis la question d’un gars terminant à la peine, le regard déjà admiratif vers celui qui va répondre « c’est moi » : « hé les gars, qui est arrivé le premier ? »
En roulant seul, vous restez maître de votre corps et de votre esprit.
Car l’effet peloton, c’est l’effet coursette ; entendez par là, la course sauvage du dimanche matin ou autre jour de rendez-vous pour des milliers de groupes cyclistes dans toute la France. On y trouve toujours « le champion », celui qui est au-dessus du lot – pas forcément le plus désagréable d’ailleurs, car certain de sa force – la cohorte des apprentis champions dont le plus fier est souvent celui qui fait désormais mal aux autres tandis que l’année dernière, c’est lui qui en bavait, et tous ceux qui suivent ou tentent de le faire tant bien que mal, tantôt jaloux, tantôt supporteurs de leurs collègues aux grosses cuisses. En réalité, rouler en peloton est le moyen de se jauger, de s’étalonner, de prouver, de briller ; mais pas que…
Un lien social
Nous avons tous besoin de lien social, et pas seulement via les réseaux sociaux : en chair et en os. Le peloton, c’est aussi ça : une mini société avec ses codes, sous-groupe de la vraie société dans son ensemble, avec des codes différents. Dans un peloton, l’habit cycliste redistribue les règles. Le directeur d’entreprise, côtoie le salarié, l’ouvrier, le commerçant, l’artisan, le chômeur, etc. Adieu les pompes cirées et la cravate, le blazer qui comme par magie fait disparaître l’embonpoint naissant. Le boss, c’est celui qui connait le vélo et qui appuie fort sur les pédales, si possible avec un certain charisme, chef de meute, capable de tout ce que l’on attend d’un leader ; mettre de l’ordre. Et lorsqu’on roule seul, on n’a pas ça…
Alors, comment faire ?
Tout simplement se dire que rouler seul, c’est la liberté. Cette liberté dont on se sent obligatoirement privé depuis plusieurs mois, par les contraintes et obligations qu’on nous impose pour vaincre – enfin – cette pandémie qui plombe notre quotidien depuis le mois de mars dernier. Dites-vous simplement que vous partez rouler car vous aimez le vélo. Seul, adieu les rendez-vous. Vous sortez rouler à l’heure qui vous convient, si vous en avez vraiment envie, en fonction de la météo. Vous choisissez votre parcours selon l’humeur du jour, déterminez vous-même votre allure, l’intensité de votre effort ; vous ne subissez pas. En roulant seul, vous restez maître de votre corps et de votre esprit. N’est-ce donc pas ça la vraie liberté ? Et si vous êtes un compétiteur, libre à vous de vous tester sur votre côte favorite – Strava est très bien pour ça – de suivre un programme d’entraînement – ce qui est quasi impossible lors de sorties en groupe – et ainsi, de garder le contrôle de forme et de votre progression. Alors, rouler en peloton, c’est bien, mais avec modération ; vous l’apprécierez d’autant plus.
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