Partager la publication "Quel volume et quelle intensité pour l’entrainement pendant la pandémie ?"
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En cette période de confinement, nombreux sont ceux qui trouvent des activités de substitution à la pratique du cyclisme sur route ou à la natation pour les triathlètes. Et cela passe par des séances de home-trainer solides, voire à des compétitions virtuelles très exigeantes sur Zwift. Ces méthodes d’entrainement ne sont pas sans risques pour la condition physique et pour la santé en général pendant la pandémie.
Par Guillaume Judas – Photos : Paul Foulonneau / wahoo, pixnio.com, flickr.com
Le home-trainer est à la mode pour les sportifs et les cyclistes et triathlètes en particulier, et pour cause. Le vélo en extérieur est interdit jusqu’à nouvel ordre en période de confinement, du moins en France et à l’inverse d’autres pays européens. Les experts font valoir d’un côté les risques encourus à pratiquer le vélo de manière sportive sur une certaine distance et à propager ou à contracter le virus, ainsi que les possibilités d’accident qui pourraient occuper les services de secours et les hôpitaux, qui n’ont vraiment pas besoin de cela en ce moment. Sans compter l’exemple à donner, et notamment concernant tous les athlètes de haut niveau vis-à-vis de l’ensemble de la population à qui on demande de rester à domicile. Et d’un autre côté, on sait qu’une pratique sportive régulière favorise le bien-être physiologique et psychologique, et maintien en bonne santé. Et notamment en renforçant le système immunitaire.
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Il ne s’agit pas en France de jouer avec les règles telles qu’elles ont été établies par le gouvernement pour quelques semaines, et précisées par le Premier ministre Édouard Philippe le 24 mars. Les sorties pour une pratique sportive individuelle, c’est au maximum une heure par jour à une distance maximum d’un kilomètre du domicile. Le vélo sportif est exclu, ce qui ne laisse guère en extérieur que la course à pied en tournant autour du quartier pour se défouler ou entretenir la forme pour les cyclistes et triathlètes.
Il reste donc la possibilité de faire de la PPG à domicile, et/ou du home-trainer. Mais cette dernière pratique n’est pas sans risques, surtout si vous comptez compenser totalement la baisse de votre niveau d’activité habituel en roulant à l’intérieur. Il est vrai qu’aujourd’hui, certains logiciels ou applications comme Zwift permettent de passer le temps et d’offrir un réalisme intéressant tout en entretenant l’esprit de compétition. Mais en l’absence de calendrier de reprise des sorties à l’extérieur à ce jour, des séances trop longues et trop intenses peuvent surtout produire l’inverse de l’effet escompté.
Les dangers du home-trainer
Une pratique trop fréquente, trop longue et trop intense du home-trainer présente plusieurs désavantages. Le premier concerne la lassitude qui peut s’installer peu à peu et vous user moralement. La période est difficile et on ne sait pas combien de temps elle va durer. C’est une sorte de parenthèse pour tout le monde. Mais elle se terminera bien un jour, et vous pourrez reprendre la route, avec de nouveau des objectifs à viser, cet été ou en fin de saison. Mieux vaut donc garder de la motivation en se privant de vélo que de trop en faire au risque de ne plus en avoir envie du tout à la reprise.
Ensuite, le fait de pédaler sur place et en intérieur n’assure pas une bonne ventilation et occasionne une forte sudation. Vous pouvez perdre jusqu’à un litre par heure, alors que l’organisme ne peut pas assimiler plus de la moitié de liquide dans le même temps. D’où un déficit hydrique et en minéraux. Ce qui occasionne fatigue, crampes ou autres dysfonctionnements de l’organisme, avec des blessures musculaires ou tendineuses, qui peuvent vous gêner plusieurs semaines. La posture fixe sur la selle peut aussi créer des blessures à l’entrejambe. Il faut penser dans tous les cas à s’hydrater avec une boisson isotonique (qui améliore la vitesse d’assimilation) et énergétique avec vitamines et minéraux pendant et après la séance. Une bonne séance de home-trainer peut durer de 40 minutes à une heure maximum. Une séance plus longue et exceptionnelle peut être envisagée, mais il faut faire la balance entre son intérêt et les risques encourus.
Si votre entraînement n’est basé que sur de l’intensité, puisque le foncier n’est pas vraiment travaillé sur un home-trainer par rapport à la route, vous ne progressez pas.
Les séries d’exercices, le cardio, les watts, c’est bien, mais à petites doses. Avec un entraînement basé uniquement sur de l’intensité, puisque le foncier n’est pas vraiment travaillé sur un home-trainer, vous ne progressez pas. Avec les facteurs énoncés plus haut, vous sombrez dans un état de fatigue permanent. Le cyclisme ou le triathlon sont des disciplines à forte dominante aérobie, et l’intensité c’est un peu comme la cerise sur le gâteau, ne l’oubliez pas.
Profitons-en pour vous parler des compétitions sur cet excellent outil qu’est Zwift, la plupart du temps très intenses mais qui ressemblent beaucoup à des épreuves contre la montre avec la nécessité de maintenir pendant plusieurs dizaines de minutes un haut niveau de puissance. La plupart d’entre elles demandent un départ très rapide, dès les premières secondes. Vous vous retrouvez face à des athlètes dont vous ne connaissez pas vraiment le niveau réel, avec des appareils différents, calibrés différemment, et dont certains ne sont pas connectés. Bref, la triche ou les arrangements avec certaines réalités sont fréquents. Rien de grave en soi, ce n’est qu’un jeu. Mais il ne faut pas trop s’y prendre non plus.
Reste que pour ceux qui ne connaissent pas, Zwift est le meilleur outil actuel pour rouler longtemps sur home-trainer. La diversité et le choix des parcours permettent de faire des sorties relativement longues à intensité modérée en limitant la lassitude et même en retrouvant des amis sur le même événement. Des sorties virtuelles en groupe sont même organisées. Si vous réussissez à vous contenir, vous pouvez exceptionnellement y participer. Mais personne ne peut encore affirmer que l’effet de ce type de séance est vraiment comparable à une sortie sur route.
Questions sur le système immunitaire
Cette période de pandémie s’accompagne de nombreuses inquiétudes, puisque ce virus n’est pas encore totalement connu, et notamment pour tous ses modes de transmission. Il est donc fort probable qu’à moyen terme une bonne moitié de la population va y être confronté, avec la plupart du temps des signes invisibles ou bénins, fort heureusement.
Se pose néanmoins la question de notre résistance face au virus, ou plutôt celle de notre système immunitaire lorsqu’il s’attaque à notre organisme. Le sport en général favorise la bonne santé et renforce le système immunitaire, mais jusqu’à quel point ? Et à partir de quel volume ou quelle intensité se trouve-t-on affaibli face au virus ?
Dès le début du XXe siècle déjà, des scientifiques s’étaient posé la question en prélevant des échantillons de sang sur des coureurs qui venaient de boucler le marathon de Boston. Ils avaient découvert que le nombre de globules blancs, une mesure clé de la fonction immunitaire, était très élevé, montrant la perturbation sur l’organisme liée à ce type d’effort. Depuis lors, les scientifiques débattent du lien entre l’exercice intensif et le risque de contracter des infections passagères, une question qui n’a jamais été autant d’actualité qu’aujourd’hui. Certains sportifs réduisent considérablement leur activité en période de confinement, alors que pour d’autres au contraire, c’est l’occasion d’en faire plus que d’habitude, avec aussi des risques de problèmes cardiaques quand l’effort n’est ni habituel, ni contrôlé.
Les médecins spécialistes décrivent généralement la relation entre le risque d’infection et la dose d’effort (une combinaison entre la durée et l’intensité) de la façon suivante : l’exercice régulier et modéré réduirait les risques par rapport à la sédentarité. On parle même d’une réduction de la moitié du nombre typique d’infections des voies respiratoires supérieures en cas d’entrainement modéré quasi quotidien. Cependant, une élévation trop importante de cette dose d’effort aurait pour effet d’inverser les effets de l’entretien physique et de rendre plus vulnérable face aux infections.
Que devez-vous entendre par une « augmentation de la dose d’effort » qui serait préjudiciable au système immunitaire ? Dans ce domaine, les spécialistes ne sont pas toujours d’accord. Une étude réalisée par le Pr Neil Walsh en Grande-Bretagne en 2015 conclut qu’un exercice de deux heures à allure modérée a plus d’effets négatifs sur le système immunitaire qu’un effort intense de 30 minutes. Ce qui voudrait dire qu’un effort long diminue plus les fonctions immunitaires qu’un effort plus court mais plus intense. Pourtant, John Campbell et James Turner, deux autres chercheurs britanniques, ont récemment (en 2018) remis en question cette conclusion en réfutant l’idée que l’exercice à lui seul serait responsable de la diminution de la fonction immunitaire. Selon eux, d’autres facteurs comme le stress associé à certaines situations, ou même le manque de sommeil, auraient autant d’influence sur la réponse du système immunitaire à l’exercice que la durée et l’intensité de l’entraînement.
Ces exercices doivent être adaptés en durée et en intensité pour ne pas fatiguer l’organisme, et ne pas vous dégouter en attendant des jours meilleurs.
Que faut-il en retenir ? Qu’il n’est pas question de s’abstenir de tout entretien en période de confinement, et qu’il est même conseillé de conserver une activité physique régulière d’une part pour rester en forme afin de stimuler le système immunitaire, et d’autre part pour bien préparer la suite. Mais que ces exercices doivent être adaptés en durée et en intensité pour ne pas fatiguer l’organisme, et ne pas vous dégouter en attendant des jours meilleurs. Et par mesure de précaution, mieux vaut éviter de s’exposer à tous les risques d’être contaminé dans les heures qui suivent un effort que vous jugeriez plus élevé que d’habitude.
Bien sûr, la dose raisonnable d’entrainement dépend de votre niveau habituel. Un cycliste occasionnel maintiendra sa forme avec une heure d’activité quotidienne à environ 60 % de ses capacités maximales, en courant, en marchant, en roulant sur home-trainer ou en pratiquant de la PPG. Un triathlète assidu pourra quant à lui doubler l’entrainement quotidien en effectuant une heure de course à pied le matin par exemple, et une heure de home-trainer l’après-midi. Un coureur cycliste pourra de son côté exceptionnellement effectuer une sortie plus longue sur Zwift en restant bien en zone d’endurance, et en alternant avec des séances plus courtes avec quelques pics d’intensité. Un sportif habituellement entrainé doit tenir compte de son niveau de stress et penser aussi à l’évacuer de manière à renforcer son système immunitaire. Mais dans tous les cas, adopter une allure modérée en endurance de base entrecoupée de quelques accélérations pour maintenir la force et la puissance semblerait plus raisonnable pour la santé et pour le maintien des fonctions immunitaires en cette période de pandémie que des intensités prolongées, qu’il vaut mieux réserver pour plus tard.
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