Travail du foncier : construire les fondations de votre saison

Impossible de parler d’entraînement hivernal sans aborder le foncier. Pour nombre d’entre nous, il consiste en un travail d’endurance rébarbatif et monotone. Détrompez-vous ! Cette phase est multiple en termes d’exercices, de coordination, d’accroissement de la condition physique générale et de récupération. Surtout, elle se révèle cruciale pour poser les fondations de votre future saison.

Par Pierre-Maxime BRANCHE – Photos : 3bikes.fr et Chiara Redaschi

Même si les conditions sont parfois difficiles, le foncier est une phase essentielle. Crédit photo : Chiara Redaschi

Après la coupure, il n’est pas toujours évident de remettre la machine en route. Baisses des températures, temps humide, routes grasses, les conditions de reprises ne sont franchement pas évidentes et pourtant, c’est à ce moment précis qu’une grande partie de votre saison se joue ! On exagère un peu, mais à l’évidence, les succès du printemps et de l’été se préparent durant l’hiver. Du coursier au cyclosportif, tous les cyclistes et triathlètes sont concernés et obligés de passer par la phase du foncier, celle qui construit les bases de votre future saison.

Car c’est bien de fondations dont il faut parler, le foncier étant une phase essentielle. L’objectif de cette préparation est l’accroissement de la condition physique générale et plus particulièrement des capacités aérobies. C’est sur cette base que le cycliste pourra par la suite effectuer des exercices spécifiques afin d’améliorer ses autres qualités : explosivité, puissance, etc.

Une fois le foncier réalisé, vous pourrez vous projeter sur des exercices de puissance, de force ou d’explosivité. Crédit photo : Chiara Redaschi

Régularité et progressivité

Mais pour l’heure, place à la régularité et à la progressivité. Tels sont les deux principaux axes du travail du foncier ! Il faut éviter d’infliger à l’organisme des efforts auxquels il n’est absolument pas préparé. L’enchaînement des sorties permet d’augmenter et d’améliorer les performances de votre système cardiovasculaire. Plus il se renforce entre chaque sortie et plus son rendement devient efficace, c’est-à-dire que le coût énergétique diminue pour un effort donné. Ce rendement est à entendre au sens large et comprend entre autres une meilleure utilisation des sources énergétiques entre les réserves de graisse et le glycogène, une meilleure coordination du pédalage, une meilleure assise sur le vélo et enfin une meilleure récupération entre les efforts. Au passage, le foncier permet aussi de diminuer la masse grasse apparue du fait de la coupure et des retombées des fêtes de fin d’année.

Pour éviter de devenir trop « diesel », autorisez-vous quelques courtes accélérations pour faire monter le coeur. Crédit photo : Chiara Redaschi

Endurance haute

Pour la progressivité, le principe est de commencer par des sorties de deux à trois heures, pour atteindre cinq heures après six à huit semaines d’entraînement selon votre niveau, cette période restant aussi à déterminer selon votre expérience. À quelle intensité ? L’idée est de rouler dans une endurance haute, soit environ 80 % du potentiel, selon les possibilités du moment évidemment. Attention cependant car le foncier a tendance à bloquer l’organisme notamment pour les efforts de plus haute intensité. Pour éviter de trop devenir « diesel », vous pouvez réaliser quelques petites accélérations en fin de sortie ou dans de courtes bosses pour rappeler au corps que le cyclisme est une activité de changement de rythme. Dès qu’une petite condition est de retour, il est aussi conseillé d’inclure des sorties plus courtes, mais plus intenses, grâce à quelques fractionnés ou intensités. Enfin, pour éviter la monotonie des sorties, n’hésitez pas à thématiser tout ou partie d’un entraînement : survélocité en montée ou en descente, musculation spécifique en montée, bosses en danseuse ou assis sur la selle, voire un peu « d’unijambisme ». Tout est bon pour que le coup de pédale redevienne souple, efficace et puissant, avant de passer, dans quelques semaines, aux exercices d’intervalles, le nerf de la discipline.

Les grands principes du foncier : Régularité, Progressivité, Endurance haute et Vélocité

Quelques idées reçues à combattre

Entre stéréotypes et clichés, le foncier n’a pas toujours bonne publicité. 3Bikes.fr corrige certaines idées reçues sur cette phase d’entraînement primordiale.

Foncier ne signifie pas balade… Crédit photo : Chiara Redaschi

1 – « Le foncier, c’est juste un travail d’endurance »

Effectivement, quand on parle de foncier, on parle de l’endurance de base. Néanmoins, on est quand même obligé de parler de zones de travail. Le foncier ne correspond pas à n’importe quelle endurance, mais bien à celle de l’aérobie. On peut parler de deux méthodes, l’ancienne et la nouvelle. Avec la version moderne, on pratique un test d’effort en milieu hospitalier, on détermine précisément les zones d’intensités selon les différentes plages de fréquence cardiaque. C’est assez facile pour, par la suite, cibler le travail souhaité. Malheureusement, « en d’autres temps » il n’y avait pas de compteur ultra perfectionné, de cardiofréquencemètre, de capteur de puissance donc il fallait trouver des solutions pour savoir quel type de travail le cycliste effectuait à l’entraînement. Les anciens avaient l’habitude de dire : « Tant que tu arrives à parler sur le vélo sans être essoufflé, c’est que tu es en aérobie. Par contre, quand tu commences à chercher ta respiration lorsque tu parles, c’est que tu arrives dans ta limite et que tu vas bientôt basculer en anaérobie lactique. » Vous pouvez vérifier avec votre cardiofréquencemètre : quand vous avez du mal à parler sur le vélo et que vous cherchez votre respiration, cela correspond à votre endurance critique.

2 – « Le foncier, c’est rouler à 50 % de ses possibilités »

Pas du tout ! On peut évaluer en pourcentage le travail du foncier, même si cela reste une théorie, et cela ne correspond pas du tout à 50 % du potentiel. Si on parle de l’endurance critique, cela se situe aux alentours de 90 % de la fréquence cardiaque maximale. Si on parle de l’endurance de base, c’est-à-dire du foncier, on sera plus aux alentours de 80 % de la FCMax.

En fonction des objectifs, des blessures ou de votre expérience, le foncier peut être nécessaire à n’importe quel moment de l’année. Crédit photo : Chiara Redaschi

3 – « Le foncier, c’est de décembre à janvier »

Il n’y a pas vraiment de date. Disons que, généralement, cela correspond forcément aux mois d’hiver, après la traditionnelle coupure de fin de saison. Mais il faut à tout prix prendre en compte les antécédents personnels : savoir si le cycliste a effectué une saison entière, par exemple de février à septembre avec des entraînements réguliers et de nombreuses compétitions ou cyclosportives, s’il a été blessé, s’il s’est arrêté pendant l’été, etc. Car le foncier, on peut en faire à tout moment de la saison : évidemment pour une reprise d’activité, mais cela peut être aussi une reprise après un accident ou une tendinite.

4 – « Le foncier, c’est enchaîner les sorties tranquilles »

Pour le coup, après avoir ciblé la zone de travail du foncier, c’est-à-dire environ 80 % de sa FCMax, on se rend compte que ce ne sont pas du tout des sorties faciles. Selon les profils, un pro roulera à 35 km/h pendant que monsieur Tout le monde roulera à 25 km/h. Par conséquent, cela veut aussi dire qu’il vaut mieux éviter les traditionnelles sorties groupées hivernales ou, du moins, ne rouler qu’avec des gens qui ont le même potentiel, au risque de rouler soit trop vite, soit pas assez, et d’escamoter sa période foncière, avec les conséquences que l’on peut imaginer sur le reste de la saison.

=> VOIR AUSSI : Sorties du dimanche matin : ce qu’il faut faire et ne pas faire

Peu importe le terrain pour réaliser du foncier. Crédit photo : Chiara Redaschi

5 – « Le foncier, c’est rouler petit plateau sur du plat »

La question n’est pas vraiment là. Lors du foncier, on peut faire tous les styles de parcours, du plat évidemment, mais aussi des bosses voire des petits cols accessibles si on ne trouve pas de neige. Il n’y a pas de parcours idéal quand on fait du foncier, l’important étant de rester dans la zone de fréquence cardiaque appropriée. On pourra très bien monter des bosses à 80 %, ça ne gênera pas du tout le travail. C’est d’ailleurs la même chose pour les braquets, il n’y a pas de règle. Les anciens préconisaient, dans un premier temps, de faire du petit plateau pour recommencer et ensuite de remettre le gros plateau au fur et à mesure des sorties. Mais ça aussi, cela dépend de vos qualités intrinsèques et de vos activités extérieures : si vous alliez la reprise du vélo avec de la musculation, du renforcement musculaire ou autre, vous aurez naturellement tendance et plus de facilités à remettre assez vite le gros plateau, par rapport à quelqu’un qui a coupé plusieurs semaines et qui ne fait rien de spécial en dehors du vélo. Par la force des choses, il restera sur le petit plateau.

6 – « Pour un bon foncier, il faut pratiquer le pignon fixe »

Il ne faut pas se tromper de cible. Le pignon fixe n’est pas essentiel au foncier. L’intérêt du pignon fixe, dans le cadre d’une reprise d’entraînement, est de retrouver les sensations d’un coup de pédale rond par opposition à un coup de pédale saccadé. Car souvent, après une coupure plus ou moins longue, on a la sensation d’un pédalage carré, qui n’est pas enroulé. Le pignon fixe permet justement de retrouver cet enroulement au niveau du coup de pédale. C’est un peu la même chose avec les manivelles Powercranks ou encore le système de perfectionnement au pédalage Thoreau Cycles Concepts. Ces outils permettent de travailler la rondeur du pédalage, grâce aux deux manivelles indépendantes, mais aussi de corriger les déficiences musculaires au niveau des cuisses, qui peuvent avoir plusieurs origines telles qu’une blessure, une chute ou une différence de longueur de jambe. Ces manivelles vont pouvoir rattraper le manque de puissance d’une jambe par rapport à l’autre. Mais en aucun cas ces systèmes sont indispensables au foncier. Ils sont intéressants à utiliser au cours de cette période en fonction des besoins de chacun, ils peuvent éviter la monotonie dans l’enchaînement des sorties, mais ils restent des supports de travail spécifique en dehors du foncier.

=> VOIR AUSSI : Comment améliorer son coup de pédale et Essai du vélo de perfectionnement au pédalage Thoreau Cycles Concepts

7 – « Le foncier, c’est monotone »

À première vue, on peut dire que ce n’est pas forcément une période très enthousiasmante : on est à court de forme, on ne roule pas spécialement vite, si c’est en hiver, les conditions climatiques sont difficiles, etc. Cependant, il faut garder à l’esprit que, d’une part, cela fait partie des bases fondamentales de l’entraînement, comme les fondations d’une maison, et d’autre part, que l’on peut tout à fait agrémenter les sorties de foncier par différents exercices, tant que l’on reste dans la zone aérobie. Certains peuvent travailler la vélocité, d’autres la puissance en faisant de la musculation dans les bosses, puisque, comme expliqué plus haut, le braquet n’a pas d’importance. Attention cependant, car un cycliste qui n’a pas l’habitude de pédaler en vélocité, et qui se met à travailler spécialement cette qualité, aura tendance à avoir le cœur très haut et du coup à ne pas rester en foncier.

Vous pouvez varier les pratiques pour améliorer votre condition physique générale… et votre technique ! Crédit photo : Chiara Redaschi

8 – « Le ski de fond est le meilleur ami du foncier »

Si la question est de savoir si l’on peut pratiquer d’autres activités sportives pour travailler son foncier, la réponse est oui. On peut varier les plaisirs. Concernant le ski de fond, même si on peut entendre chaque hiver que c’est la meilleure discipline correspondante pour bénéficier de bienfaits sur la condition physique, la question se pose car il suffit de mettre un cardiofréquencemètre pour se rendre compte que cette pratique fait très vite monter le cœur, qui plus est dans des fréquences assez hautes, et qu’il est ainsi très difficile de cibler la zone aérobie. Ce n’est pas impossible, pour ceux qui se connaissent très bien, mais c’est difficile car le ski de fond met en jeu les quatre membres dans un mouvement de balancier, sur des parcours parfois assez accidentés et sollicite ainsi les capacités cardiaques de manière très importante. On peut très vite ne plus se retrouver en foncier, mais en anaérobie lactique, la zone des 90 % de la FCMax.

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Pierre-Maxime Branche

- 41 ans - Journaliste professionnel depuis 2004 en presse sport spécialisée et information générale. - Pratiques sportives actuelles : triathlon & fitness. - Instagram : pierre_maxime_branche

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