Compte rendu de l’Ariégeoise sous le regard avisé d’un cyclosportif de longue date

L’Ariégeoise est tout simplement la principale cyclosportive française des Pyrénées et cette édition 2024 avec 4200 inscrits, n’a pas dérogé à la règle. Derrière un tel succès durable au fil des années, il y a forcément des attentes élevées de la part des participants, qui sont satisfaites par le haut niveau des prestations offertes, à tous les niveaux. Retour sur le cru de l’année avec le regard de Stanislas Richard qui renouait avec une participation à une cyclosportive après neuf années sans accrocher un dossard.

Texte : 3bikes.fr – Photos : Tomas Montes / Ariégeoise, les Rouleurs de Mécaniques

Retour en arrière avec l’année 2015 et la dernière cyclosportive de Stanislas Richard avec sa participation à la Haute Route Alpes Suisses – Dolomites, cette fameuse épreuve disputée en sept étapes, en l’occurrence entre Genève et Venise. Dès lors, âgé de 50 ans Stanislas n’a plus vraiment envie d’épingler un dossard. Il faut dire qu’il est présent sur le « circuit » depuis l’année 2001, après un court passage en triathlon (deux fois finisher du triathlon d’Embrun au début du XXe siècle). A son palmarès figurent une victoire scratch sur l’Arvan Villards en 2003, une deuxième place sur la Bourgui (une semaine plus tard) ainsi que de très nombreux Top Tens scratch sur bon nombre d’épreuves sur les années 2001 à 2003 avant de se placer très régulièrement sur des podiums en catégorie au fil des années. Et puis, en 2020 une grave chute le laisse avec une fracture complexe du fémur, cassé en sept morceaux. Pendant deux ans, il s’applique à se soigner avant de reprendre gentiment puis de parfaire sa condition physique au fil des kilomètres et de stages organisés qui lui permettent de faire un gros volume entre deux longues périodes professionnelles pour cet ostéopathe qui a exercé ses talents autour de Gap ou avant d’opérer aujourd’hui près de Thonon.

Stanilas Richard à la fin du Mur de Péguère en préparation de l’Ariégeoise, quatre jours avant la cyclosportive

Tout était réuni pour faire une belle Ariégeoise, par Stanislas Richard

« Après neuf ans sans cyclosportives d’un côté et quatre ans après mon grave accident à la jambe de l’autre, l’envie est revenue progressivement en même temps qu’une condition physique correcte même si je ressens le poids des années qui passent, non loin de la soixantaine. Mais surtout, en cette fin juin 2024 les conditions étaient réunies : l’Ariégeoise était programmée en fin de semaine d’un stage organisé par les Rouleurs de Mécaniques, je pouvais avoir un dossard prioritaire et Olivier Dulaurent qui écrit pour 3bikes.fr m’avait fait ce « cadeau » de me proposer d’être un équipier de luxe pour me permettre de faire la meilleure performance possible le jour J.

Un lacet du Mur de Péguère

Avant celui-ci, en plus des cols proposés au menu de l’Ariégeoise, en stage nous avions pu découvrir les charmes des routes de l’Ariège : Péguère, Marmare, Agnes, Port de Lers, Beille, Route des Corniches, autant de montées plus ou moins connues mais qui méritent toutes l’effort de parvenir au sommet, tant pour le défi physique que pour les paysages.

Cela a donc été une superbe semaine, enrichissante à tous les niveaux, tant au niveau de l’ambiance à la fois familiale et sportive avec le juste degré de difficulté. A ce sujet, je ne saurais que conseiller de faire un stage la semaine qui mène à une cyclosportive. A condition bien sûr d’avoir un minimum d’entrainement (pour mieux récupérer d’un jour à l’autre), le fait d’enchainer les cols et même les grandes sorties (environ 5h avec le Port de Pailhères) à J-2, les jambes prennent de la force et le cœur a tendance à se « tasser » au bénéfice donc d’une fréquence cardiaque systématiquement plus basse qu’en début de semaine et par conséquent d’un moindre essoufflement et… de moins de fatigue. A coup sûr, l’Ariégeoise en lieu et place de la 1ère sortie du stage aurait donné un résultat nettement moins probant.

Comme tous les inscrits sur le grand parcours (142 km, près de 4000 m de dénivelé), j’ai appris la modification du parcours avec le basculement sur la boucle intermédiaire (115 km pour près de 3000 m de dénivelé) la veille alors que j’étais en train de récupérer mon dossard, pour cause de météo annoncée très orageuse. Malgré une relative déception (j’avais envie de me confronter à l’endurance nécessaire pour gravir le Port de Pailhères en fin de parcours avant d’enchainer sur le plateau de Bonascre), il faut se mettre à la place des organisateurs. Car si nous avons envie de céder à l’envie de râler pour ce changement de dernière minute, nous aurions été les premiers à trouver anormal de subir les conséquences d’un temps catastrophique à 2000 m d’altitude. J’imagine que le récent accident mortel sur une épreuve ultra distance en trail dans les Alpes a aussi contribué à redoubler de prudence du côté des organisateurs.

Côté parcours, ça ne fait que monter et descendre sans temps mort, mis à part les 20ers kilomètres quasiment plats qui ont finalement été ceux où j’ai atteint ma fréquence cardiaque maximale ! Un comble alors que j’étais plutôt bien caché dans les roues mais je paye là mon déficit de force avec mon gabarit léger et un choix délibéré d’avoir un vélo qui grimpe (léger, jantes basses) plutôt qu’une machine aéro.

Une fois l’entame du col de la Lauze effectuée, c’est donc un festival. Les montées vers Montségur, Croix des Morts, 7 frères, Chioula et enfin, Bonascre s’enchainent avec très peu de plat, ce qui est personnellement un avantage  et même s’il faut garder les roues sur les passages les plus roulants. C’est ici que le raccourcissement du parcours s’est fait sentir dans l’intensité générale : s’il avait fallu monter Pailhères, la gestion de l’effort dans sa globalité aurait été différente. Ici à l’inverse et pour une partie du peloton c’est « à fond dans toutes les montées et on verra bien ce qu’il reste pour monter à Bonascre ! » Principalement pour cette raison et bien que je me sois efforcé de le faire, je n’ai pas pu complètement goûter à la beauté des paysages… mais j’avais eu davantage l’occasion de le faire lors de notre préparation. L’Ariège c’est à la fois beau et sauvage, deux qualités que j’apprécie particulièrement en venant des Alpes, dont les plus beaux trésors sont souvent nettement plus fréquentés.

Les descentes s’effectuent en totale sécurité et il faut louer la qualité de l’organisation (et sa gestion de la sécurité) qui signale les virages plus compliqués à négocier, qui place de nombreux signaleurs aux endroits stratégiques – carrefours évidemment mais pas seulement – et empêche la remontée des voitures en sens inverse de la course sur la plupart des ascensions – j’ai presque eu l’impression que c’était le cas pour toutes les ascensions ! D’ailleurs je n’ai pas fait le compte des voitures que nous avons vues sur le parcours, mais elles n’étaient vraiment pas nombreuses en comptant la totalité du parcours. C’est ici que l’on comprend pourquoi l’Ariégeoise est devenue une réelle référence dans les Pyrénées.

De mon point de vue, s’il fallait vraiment trouver quelque chose à redire, le seul petit bémol pourrait provenir des ravitaillements, certes en nombre suffisants et régulièrement positionnés mais peut-être trop « champêtres » et pas assez « sportifs », c’est à dire davantage orientés sur le salé/gras que sur les glucides avec peu de produits énergétiques de l’effort. Mais il s’agit là d’une appréciation probablement personnelle car pour beaucoup de cyclistes, quand les heures s’accumulent le sucré a du mal à passer.

Pour revenir sur ma fin de course, l’ascension vers Bonascre a été légèrement « sauve qui peut », avec ce qu’il restait – c’est à dire pas grand’ chose – d’énergie. Mais à voir la tête et la vitesse des autres concurrents, je n’étais pas le seul dans cet état. Mais je me devais aussi de donner le maximum pour accrocher la roue de mon ange gardien du jour et rester concentré pour donner le maximum jusqu’à la ligne d’arrivée. Au sujet de cette dernière montée, quel plaisir là encore d’évoluer dans le silence et la sécurité, c’est à dire sans voitures ! Cela fait un sacré contraste avec de nombreuses cyclosportives alpestres qui laissent les voitures suiveuses venir « polluer » l’effort de ceux qui en terminent.

Et puis redescendre en télécabine jusqu’à Ax les Thermes, là encore un petit plaisir qui est plutôt rare et particulièrement appréciable, laisser le plaisir d’avoir la route à soi pour tous ceux qui montent.

Je repars donc de Tarascon sur Ariège complètement conquis par l’Ariégeoise, avec un maillot plutôt sympa en prime !« 

Le sommet du plateau de Beille, non emprunté par l’Ariégeoise cette année mais qui reçoit le Tour de France le 14 juillet

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Olivier Dulaurent

- 48 ans. – Pigiste presse écrite et Internet depuis 2004, auteur de Le Guide du Vélo Ecolo (Editions Leduc, novembre 2020), Moniteur Brevet d’Etat Cyclisme, encadrant de stages cyclistes depuis 2005 et coach cycliste - Pratiques sportives actuelles : cyclisme route et VTT (occasionnelle : course à pied) - Strava : Olivier Dulaurent

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